Motherboard ta mère. Pourquoi faut-il éviter les cartes électroniques ou cartes

Ceci n’est pas une introduction. Ceci est une introclusion. Car je sais que peu d’entre vous liront la totalité de ce texte. Et pourtant vous devriez. Car si vous êtes sur le point d’acquérir un bateau amorceur, le plus grand des précipices se présente déjà devant vous.

Les cartes mères. Deux mots, d’abord méconnus, mais que l’on apprend vite, très vite à connaître après quelques années (mois ? semaines ?) de pratique des bateaux amorceurs. Deux mots obscurs qui cachent une réalité, souvent douloureuse, pour leurs propriétaires. Deux mots qui sont surtout et avant tout la conséquence de l’évolution d’un monde, celui de la production industrielle mondialisée.

 Cette idée de texte, aux allures de pamphlet, je ne vais pas vous le cacher, m’est venu un soir de juin 2022 après une journée où mes mains avaient trop saigné et mon temps été trop gaspillé pour des réparations qui ne devraient pas exister. Surtout, des réparations impossibles.

 Et je parle ici de ma réalité de réparateur de bait boats. Car l’autre réalité des cartes électroniques dans les bateaux amorceurs, ce sont les dérives associées afin de vous tenir captif d’un système propriétaire totalement lié à son concepteur ou distributeur. Et de plomber à coup sûr votre porte-monnaie et votre moral…

Depuis 2016 et la création de Fish’In Design, je dénonce ce principe de conception, que je le pensais acté dans une sorte de statuquo réservé à des modèles d’entrée de gamme « où l’on sait dans quoi on s’engage ». Mais voici que le haut du panier se lance à son tour dans la technologique facilité où l’apparat prend le pas sur le bon sens.

Et si l’arrière-pensée de récupérer un grand nombre de bateaux en SAV n’est jamais très loin pour l’entrepreneur que je reste, c’est avant tout l’idée du désastre moral, financier et écologique qui prend le pas. Car marketing business ne se retrouve jamais très loin des mots carte et mère. Et vous savez mon amour pour les discours publicitaires erronés. Ou du moins incomplets.

Alors, prenons la plume et suivez-moi pour un sombre voyage au pays de l’industrialisation facile, les coûts de production au rabais et les choix douteux pour toujours vendre plus au détriment du consommateur. La (vraie) conclusion sera au bout du récit.

Une carte mère typique d'un bait boat

Des possibilités de production du monde

Vous n’êtes pas sans savoir que le monde qui nous entoure a énormément évolué depuis les années 1900 et continue encore d’évoluer à vitesse grand V. Depuis l’avènement de l’ère industrielle et ses 2 révolutions successives, l’entrée dans l’humanité du pétrole, l’électricité et enfin l’électronique, les vies humaines ont connu d’énormes bouleversements. D’une sorte de rien nous sommes passé au « tout », l’ère de la technologie, des équipements, accessoires, gadgets etc.

Industrialisation au 19ème siècle


 
Mais dans cette histoire, l’évolution n’a pas été linéaire et elle a connu plusieurs grandes phases. Nous ne sommes en effet pas passé des premières machines à vapeur aux premiers ordinateurs ni enfin aux smartphones en un claquement de doigt. Et ce que je trouve excessivement intéressant ici, dans le thème de cet article, c’est le mariage entre la mécanique pure et l’électronique pure. Que l’on va simplifier avec le terme « électromécanique ». L’électromécanique, c’est une immense branche de l’électronique qui comprend un très grand nombre d’applications et d’objets associés. L’électroménager, les appareils Hi-Fi, nos automobiles etc etc.

Or, si vous comparez un aspirateur ou réfrigérateur des années 1960 avec un modèle récent, vous comprendrez vite que l’on ne se situe pas vraiment dans le même monde. Les progrès en matière de composants électroniques, miniaturisation des composants, et surtout, l’avènement des processeurs et contrôleurs, avec la possibilité d’entrer du « code » ont totalement changé la donne.

Electro-mécanique



Nous sommes au fil des décennies passé de l’analogique, l’électromécanique basique où le mécanique prenait le pas sur l’électronique, au numérique, avec une électronique prépondérante sur la mécanique.

Pour un énorme bien : la multiplication des possibilités techniques. Un aspirateur « moderne » aspirera mieux, de manière plus économe, plus facilement, avec plus de confort et de facilité d’utilisation qu’un modèle de 1960. Et ce n’est qu’un exemple simpliste de la vie courante…

Or cette sorte de « progrès social » (je laisse de côté ce débat fort intéressant) se retrouve aussi justifié par des coûts de production tirés vers le bas et une automatisation dès lors possible des fabrications. Une évolution logique du Monde condensé dans l’appellation de Mondialisation.

Et c’est ainsi que sont apparus les fameuses cartes électroniques « tout intégré », les cartes mères, capables de commander la totalité d’un système, notamment électromécanique, à partir de l’addition de composants électroniques et quelques lignes de codes (informatique) bien senties inséré dans des microprocesseurs, cœurs et cerveaux de ces cartes.

Carte mère, version PC


Pour autant, « l’analogique » n’a pas disparu. Et même s’il n’a plus rien à voir avec ce qu’il a pu être dans les années 60 ou 70, avant l’avènement du tout électronique, on le retrouve par touche, ci et là. Bon, je vous avouerais, trop peu souvent à mon goût, mais là aussi c’est un autre débat. Ce côté analogique, vous le retrouverez dans tout appareil / système, qui ne possède pas un cerveau central dirigeant la totalité des commandes / contrôles du dit appareil ou système. Ce sera l’objet sans la fameuse carte mère et son microprocesseur calculateur.

Alors attention, cela ne dit pas qu’il n’y a pas d’électronique dans l’appareil / système en question, cela dit simplement que toute l’électronique présente reste indépendante et ne contrôle qu’une seule fonction.

Pour éclaircir cette idée, dans la vulgarisation et l’image que je me suis construite, l’analogique, c’est le fonctionnement partiel, libre, un peu « bricolage », le panel de tous les chiffres ou des couleurs, c’est l’infinité de choix possibles pour une fonction, c’est rien/un tout petit peu/un peu/un peu plus/beaucoup/énormément etc.

Une pièce symbolique de ce fonctionnement, c’est le bon vieux potentiomètre résistif.

Un objet symbolique de ce fonctionnement pourrait être un bon vieux synthétiseur des années 60 ou 70 avec le son dit analogique, à base de lampes et composants électroniques simples, condensateurs, résistances, transistors etc.

Le numérique, c’est le 0/1, le marche / arrêt, le oui / non, le langage logique. Une fonction, un choix, un contrôle. Mais, le tout contrôlé par un processeur, un cerveau, qui envoie les ordres, des milliers, des millions d’ordres à la seconde. Des choix restreints à la base, mais démultipliés (artificiellement) au final.

Une pièce symbolique de ce fonctionnement, c’est un sélecteur numérique, sorte de nouveau potentiomètre.

Un objet symbolique de ce fonctionnement pourrait être synthétiseur « moderne » totalement numérique avec un son dit numérique justement, à base de puces et composants électroniques complexes, processeurs et autres micro-contrôleurs.

J’aime cette analogie au monde de la musique car il est extrêmement parlant. Discutez avec un musicien du son d’un ampli « lampes » et d’un ampli numérique. Vous comprendrez ; )

Ceci explique donc des différences de comportements des objets / systèmes entre 1960 et aujourd’hui, entre le vieil aspirateur et le moderne. Nous sommes passés du simple à l’infinité de possibilités, le confort, le « progrès social » etc.

Aspirateurs, 1960 vs. 2023



Et nos bateaux amorceurs dans tout ça ? Et bien, ils sont aux premières loges. Le modélisme en général est aux premières loges.

La base du modélisme, c’est l’analogique, l’électromécanique primaire, simple, basique, efficace, fiable. Un composant, une fonction, un coordinateur pour envoyer les ordres, un ordre, une fonction. Je parle bien ici de l’addition de composants dits modélisme permettant de faire fonctionner à distance une voiture, un avion ou un bateau.

Qui sera opposé au modélisme numérisé, totalement intégré et contrôlé avec une carte électronique principale qui sera en charge de gérer la totalité d’un système. Avec naturellement plus de possibilités techniques comme nous l’avons vu précédemment. Mais aussi plus de difficultés et problématiques, que je vais vous détailler maintenant.


Possibilités et facteurs de choix


Comme nous l’avons vu dans la première partie, les possibilités techniques, ludiques, de confort, penchent très largement en faveur du moderne, des cartes électroniques. Et je reste ici d’un point de vue utilisateur. Car si l’on bascule du côté fabricant, il n’y a plus de doute possible quant à la nécessité d’utiliser une carte mère :

-          Produit plus aguicheur et vendeur
-          Fabrication simplifiée
-          Coût de production réduit

Cette radiocommande? Fuyez !


Si l’on ajoute à ces 3 points un SAV aux oubliettes et la possibilité de jouer la carte de l’obsolescence programmée, la voie est royale. Mais je m’égare…

 
Ainsi, dans le cadre des bateaux amorceurs, nous aurons ce double choix :
1, les composants modélisme
2, les cartes mères.

 
Dans le cas numéro 1, vous retrouverez des bateaux à la première allure simpliste, presque vieux jeu puisque sans l’apparat et le clinquant du moderne. Une grosse radiocommande, des designs de coques classiques permettant d’intégrer tous les composants ensembles (récepteur radio, variateurs de vitesse, interrupteurs, servomoteurs etc.), mais aussi des fonctions annexes, sondeurs, GPS autopilotes, caméra etc.

Modélisme et indépendance.



Oui car simple ne veux pas dire non performant ou technologiquement dépassés, bien au contraire. Il s’agit simplement d’un aperçu extérieur du produit. A l’intérieur, vous pouvez retrouver exactement les mêmes fonctions entre ces 2 modes de fabrication, simplement la version « composants modélisme » demandera plus de matériel avec un ensemble de composants indépendant les uns des autres, donc plus de place et imposera des choix de design plus simples.

Dans le cas numéro 2, vous l’aurez compris, c’est tout l’inverse. Une carte unique pour tout gérer, y compris un éventuel sondeur et GPS, un format réduit, des possibilités de design quasi infinis, un côté ludique et « « « beau » » » du produit. Sans parler tarif…

Les possibilités techniques penchent clairement de ce côté de la balance. Mais à un prix…

Côté mise en œuvre et fabrication, là encore les différences se font sentir. Un bateau amorceur monté en composants modélisme demandera du temps et de la patience. Il est en effet nécessaire de câbler tous les composants entre eux, de les relier au circuit de commande, de faire des tests de mise en route et réglage en fonctionnement. Une automatisation complète des lignes de production est quasi impossible.

A l’opposé des constructions à base de cartes mères. Une seule plaque de composants où viennent se connecter 1 ou 2 moteurs, un faisceau de microcâbles pour toutes les fonctions annexes et c’est terminé. Une automatisation complète de la ligne de production dans des contrées lointaines est alors totalement possible afin de réduire au maximum les coûts de production.

Carte mère déguisée



Le coût de production. Le nerf de la guerre sans doute. Que je vais résumer en 2 points :
-          Un composant modélisme moyen = environ 15-50€
-          Une carte électronique typique d’un BA = environ 10€ si production de masse

Ainsi la question elle est vite répondu.

 
Additionner 4 à 5 composants modélisme et y ajouter la main d’oeuvre associée vous donnera un coût de revient très largement supérieur à une seule carte mère dont le temps d’assemble du bateau se trouvera lui aussi extrêmement réduit.

Et c’est ainsi que sur le marché actuel on peut retrouver des modèles à partir de 200€ avec des montages cartes mères contre environ 800 à 1000€ pour un modèle similaire en composants modélisme. Si l’on ajoute à cela que, bien souvent, les bateaux modélisme sont fabriqués en France, Angleterre, Pays-Bas contre l’Asie pour les modèles à carte. Comment dire ?..

Enfin, le bas blesse totalement s’il s’agit d’intégrer un sondeur ou un GPS dans le bateau. Avec des composants modélisme, il vous faudra un matériel spécifique dont le coût variera de 300 à près de 2000€. Mais, pour une carte mère, rien de plus simple, quelques composants en plus et vous voilà muni des fonctions sonar et GPS. Pour quelques euros de plus…


Modélisme brushless

Bon sens et déraison


Et ? Me direz-vous ? Voilà 5 pages que je déblatère sur les cartes mères, sans pour le moment donner d’éléments tangibles quant à leur utilisation déraisonnable dans le domaine des bateaux amorceur. C’est que j’ai gardé le meilleur pour la fin, rassurez-vous.

Car oui, à cet instant, le portrait semble flatteur pour les cartes mères. Plus de possibilités, design aguicheur, coût réduit. Pensez-vous réellement que le portrait s’arrête ici ? J’ai volontairement tu les problématiques associées, accrochez-vous bien, nous y allons de ce pas.

Feu !


La première problématique, c’est une question de système propriétaire. A l’image de ce que l’on retrouve aujourd’hui dans le monde de l’informatique, le numérique permet la création de système totalement propriétaire dont seul le fabricant possède la clé. Ainsi, choisir un bateau à carte mère c’est se retrouver pieds et poings liés à son fabricant sans possibilité de se retourner vers un autre.

Il ne sera pas possible de faire évoluer son bateau, changer les moteurs ou intégrer d’autres fonctions comme un projecteur ou un autopilote indépendant par exemple.

Code source


Et ce problème devient encore plus concret lorsqu’il faut évoquer la fiabilité des bateaux à carte électronique. En effet, ces cartes sont souvent totalement inadaptées à l’utilisation dans les conditions pêche, humidité, froid, chaleur. Pire, certaines sont mal conçues et ne supportent pas le moindre écart de courant (herbe dans une hélice par exemple), grillant alors instantanément.

Ces cartes possèdent également régulièrement des failles dans leur mode de fonctionnement, particulièrement au moment du démarrage du bateau où des cycles de vérification doivent se lancer pour contrôler l’état du bateau. Et déraillent. Bloquant ainsi toutes les fonctions du bateau et imposant un SAV couteux.

Alors je pondère, l’électronique a fait d’énorme progrès ces dernières années, un PC peut tourner les dizaines de milliers d’heures sans défaillir par exemple. Mais mon expérience personnelle sur les bateaux amorceurs me montre que ce niveau n’est pas atteint pour les bait boats à l’heure actuelle. Principalement à cause des conditions d’utilisation, l’humidité en tête. Mais pas que !

Si les systèmes électroniques modernes et fiables voient leur utilisation se faire dans des conditions que l’on qualifiera de sympathiques, au sec, à température modérée, sans trop de saletés etc., ces utilisations se font aussi et surtout avec des courants électriques circulant très faibles, ne dépassant quasi jamais les 1 ampères.

Or, les courants circulants dans les bateaux amorceurs, en fonctionnement de navigation, ne sont jamais SOUS les 3 ou 4 ampères ! Et pour peu que vous ayez des moteurs / transmissions usées, un bateau lourd (disons supérieur à 6 kilogrammes) dans des conditions immondes (gros froid / grosse chaleur / humidité), les pics à 10 ou 15A sont tout à fait possibles.

Et si vous ajoutez un incident type herbe / surcharge / perte de signal radio, j’espère que vous avez des fusibles de protection dans votre système…

Ceci constitue LE réel et principal problème.

Une carte électronique, un système « numérique » n’est absolument, et ne sera jamais, adapté à un bateau amorceur.

Un bateau amorceur n’est pas un simple bateau, ce n’est pas une voiture ni un avion radiocommandé. C’est un outil, pas un jouet.

Brûlé...



Parcourez les forums et groupes de discussions bateaux amorceurs, vous constaterez qu’il ne s’agit en rien d’une légende urbaine.

Car maintenant vous faites le lien. Panne + système propriétaire = Problèmes !

La réparabilité des bateaux amorceurs à carte mère est proche du nul. En effet, à moins de posséder une réplique exacte de la carte électronique d’origine, il n’y a rien à faire si ce n’est tout remplacer. Ou être un génie de l’électronique. Il en existe oui, j’en connais personnellement un.

Pire, un remplacement de carte ne solutionne pas toujours le problème et la réparation ne tient alors que quelques heures. En effet, un des gros problèmes des bait boats est la transmission. Or une transmission défectueuse, grippée, peut faire sauter une carte mère. Or remplacer une carte sans corriger le défaut de transmission, c’est l’assurance de faire griller la nouvelle carte rapidement.

Et ceci n’est qu’un seul des exemples possibles…

Dans tous les cas les coûts de réparation seront prohibitifs à moins de posséder un modèle sans option, ni sondeur ou GPS.

Car avec un GPS / sondeur associé, dans la carte, avec sortie sur la radiocommande notamment, vous en perdrez l’usage immédiatement. Et devrez vous tourner vers des modèles indépendants telles les marques Toslon ou Lucky.

Cette radiocommande? Fuyez ! (2)



Nous terminons donc ici notre chemin dans les méandres de l’électronique du modélisme.

De la basique vulgarisation des termes du domaine en passant par la transposition et l’application dans le monde des bateaux amorceurs appuyés par des faits et expériences concrètes sur le terrain, j’espère vous avoir autant intéressés qu’instruits.

Car oui le choix d’un bateau amorceur doit être averti, informé et surtout lucide. Bien entendu je viens de dresser un procès au vitriole des cartes mères dans les bateaux amorceurs et pourtant tout n’est pas forcément à jeter dans ces constructions. Mais dans tout les cas l’utilisateur doit être averti de l’engagement qu’il prend avec l’acquisition d’un tel système. Surtout quand celui-ci s’élève à plusieurs milliers d’euros et qu’une éventuelle réparation en couterait le double.

Aujourd’hui les bateaux amorceurs montés en composants modélisme sont plébiscités par nombre d’utilisateurs. Notamment ceux ayant connus des déboires avec une première acquisition à carte mère. Parce qu’ils ne savaient pas, ils l’ont appris à leur dépend.

Alors avant de faire votre choix, prenez le temps de réfléchir à votre besoin, et surtout, choisissez en votre âme et conscience, « en sachant ». Ceci étant la première condition pour ne jamais être déçu.

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